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Actualité de l'ENS de Lyon

Comprendre la reproduction des plantes pour améliorer les stratégies de sélection végétale

Grain de maïs
Communiqué de presse / Publication
 

Publication du RDP dans le revue Nature Plants le 9 juin 2020.

Communiqué de presse de l'INRAE.

L'amélioration végétale consiste à créer de nouvelles variétés à partir des variétés existantes en croisant entre elles les plantes choisies pour leurs qualités respectives. Les meilleures plantes issues de ces croisements - les descendants - sont sélectionnées jusqu'à obtenir une plante avec les qualités voulues. La reproduction sexuée des plantes permet ainsi la sélection par générations successives de traits avantageux (résistance à certaines maladies, meilleure productivité, qualités gustatives…) grâce au brassage des génomes du père et de la mère. La diversité génétique est donc un élément clé de la sélection variétale. Après le brassage génétique les combinaisons favorables sont ensuite stabilisées dans des lignées qui sont évaluées par le sélectionneur. Chez certaines espèces de plantes à fleurs, il existe une reproduction modifiée aboutissant à l’obtention d’embryons de plantes contenant le matériel génétique d’un seul des deux parents, fixant la variabilité génétique acquise aux générations précédentes en une seule étape et facilitant ainsi certaines étapes de la sélection variétale. Des chercheurs du laboratoire Reproduction et développement des plantes (Univ Lyon, ENS de Lyon, UCB Lyon 1, CNRS, INRAE), avec la collaboration de Limagrain, font un état des connaissances actuelles sur ce processus atypique chez les plantes à fleurs. Leur analyse, publiée le 8 juin dans Nature Plants, fait ressortir de nouvelles perspectives à la fois pour la recherche fondamentale et pour la sélection variétale.

Chez toutes les plantes à fleurs (par exemple le maïs, le blé, la tomate…), la reproduction sexuée présente un processus unique appelé double-fécondation. Lors de ce processus, deux fusions séparées et simultanées des gamètes mâle (père) et femelle (mère) donnent la graine qui contient d’une part l’embryon qui donnera la future plante, et d’autre part l’abumen, un tissu nourricier, qui alimente l’embryon en énergie lors de la germination. Vers la fin des années 1950, des anomalies de double-fécondation ont notamment été découvertes chez le maïs où certaines plantes présentaient un processus modifié. Les embryons obtenus étaient haploïdes, c’est-à-dire qu’ils contenaient uniquement les chromosomes issus du matériel génétique de l’un des deux parents, sans la paire complémentaire du deuxième parent. Pour être viables, ils dupliquaient leurs chromosomes à l’identique. Les plantes ainsi obtenues étaient des "lignées pures", c’est-à-dire qui produisent par auto-fécondation une descendance génétiquement identique à elle-même. Ce processus modifié, appelé reproduction par induction haploïde, présente un grand intérêt pour la sélection des plantes car elle permet de fixer la variabilité acquise lors des étapes de sélection antérieures en deux générations contre sept en moyenne pour les plantes ne présentant pas cette anomalie de reproduction. Dans cet article, les découvertes récentes sur la reproduction par induction haploïde sont résumées et mises en relation afin de proposer de nouveaux modèles pouvant expliquer leurs fonctionnements.

Un nouveau modèle pour cette double-fécondation modifiée

Au cours des 60 ans de recherche sur la reproduction par induction haploïde, deux hypothèses principales, qui ont souvent été opposées, sont apparues pour expliquer ce phénomène. La première est fondée sur l’absence de l’une des deux fécondations dans le processus de double-fécondation et la seconde suppose une double-fécondation réussie mais suivie de l’élimination du génome de l’un des deux parents. À la lumière de récentes découvertes sur les processus moléculaires qui régissent la double-fécondation et de leur analyse, les chercheurs émettent une nouvelle hypothèse, compatible avec les deux hypothèses historiques : un défaut lors de la double fécondation créerait une situation propice pour la formation d’une graine viable mais contenant un embryon haploïde formé par l’élimination de l’un des deux génomes parentaux.

Cette analyse ouvre de nouvelles perspectives de recherche afin de mieux comprendre la reproduction des plantes et appréhender les questions de stabilité des génomes et du dialogue entre les gamètes mâle et femelle chez les plantes. Pour la sélection variétale, la meilleure compréhension de la reproduction par induction haploïde, et notamment les mécanismes de ce processus, est crucial pour une amélioration de l’efficacité des processus de sélection.

Source : Puzzling out plant reproduction by haploid induction for innovations in plant breeding. Nathanaël M. A. Jacquier, Laurine M. Gilles, Douglas E. Pyott, Jean-Pierre Martinant, Peter M. Rogowsky and Thomas Widiez, Nature Plants, juin 2020.

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