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Emprisonnement ou évasion, le sort inéquitable des particules actives en cellule

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Publication
 

Publication du Laboratoire de Physique dans la revue Journal of Fluid Mechanics le 14 septembre 2022. Communication du CNRS-INSIS du 30 septembre 2022.


Dans un écoulement, le transport de particules ou de micro-organismes peut être modifié s’ils sont attirés vers des zones riches en sels ou en nutriments. Des chercheurs et chercheuses du Laboratoire de mécanique des fluides et d’acoustique, du Laboratoire de physique de Lyon et de l’Institut Camille Jordan ont découvert un comportement contre-intuitif de ces entités. Les plus mobiles d’entre elles peuvent se retrouver paradoxalement bloquées alors que les moins actives iraient plus vite.

Dans les systèmes dits "actifs", les particules en suspension dans un fluide sont sensibles à leur environnement et y réagissent. On retrouve des exemples comme la diffusiophorèse, quand des particules solides se déplacent sous l’effet d’hétérogénéités en sel, ou la chimiotaxie où des bactéries se dirigent vers les régions plus riches en nutriments. Dans ces phénomènes, la vitesse de dérive des particules et des micro-organismes reste généralement très inférieure à celle des écoulements dans lesquels ils sont entraînés. Cela se traduit le plus souvent par une diffusion modifiée des particules. Des chercheurs et chercheuses du Laboratoire de mécanique des fluides et d’acoustique (LMFA, CNRS/École Centrale de Lyon/INSA Lyon/Université Claude Bernard Lyon 1), du Laboratoire de physique (LPENSL, CNRS/ENS de Lyon) et de l’Institut Camille Jordan (ICJ, CNRS/École Centrale de Lyon/INSA Lyon/Université Claude Bernard Lyon 1/Université Jean Monnet) ont cependant montré que, en présence de cellules de recirculation, où les écoulements tournent sur eux même, les particules et les bactéries présentaient un déplacement totalement contre-intuitif. Mêlant ingénierie, physique et mathématiques, ces résultats ont été publiés dans la revue Journal of Fluid Mechanics.

À partir de simulations numériques, l’équipe a observé deux comportements possibles, dont aucun n’est diffusif. Si l’attraction est très faible, comme c’est le cas en diffusiophorèse, les particules se déplacent vers les régions riches en sels en passant d’une cellule de recirculation à l’autre, ce qu’elles font avec une vitesse bien plus importante qu’en l’absence d’écoulement. Quand l’attraction est en revanche un peu plus forte, comme pour la chimiotaxie, les bactéries sont totalement bloquées dans leurs cellules de recirculation. Ces phénomènes sont expliqués par la répartition hétérogène du sel et des nutriments le long des lignes séparant les cellules de recirculation. Les scientifiques ont aussi montré que l’on peut définir un critère de blocage indépendant de la vitesse de l’écoulement. Selon ce critère, les bactéries seraient condamnées à consommer la quasi-totalité des nutriments de leur cellule avant de pouvoir s’en évader ! Des expériences sont en cours pour illustrer ces comportements contre-intuitifs.

Figure
Suivi stroboscopique de trajectoires (chaque couleur correspond à une particule) dans quatre vortex pour des valeurs croissantes du critère de blocage. Pour les plus grandes valeurs (en bas), toutes les trajectoires sont bloquées dans leurs cellules.
© Volk et al.

Référence : Phoresis in cellular flows: from enhanced dispersion to blockage. Romain Volk, Michaël Bourgoin, Charles-Édouard Bréhier et Florence Raynal. Journal of Fluid Mechanics, 14 septembre 2022.
DOI : 10.1017/jfm.2022.730

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