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Infections cutanées profondes : des mécanismes de virulence distincts et complémentaires pour Staphylococcus aureus et Streptococcus pyogenes

Microscopie électronique en transmission (MET) montrant des bactéries en division (Staphylococcus aureus) dans le cytoplasme de cellules musculaires en culture.
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La fasciite nécrosante est une infection gravissime des tissus sous-cutanés et musculaires dont le Streptocoque du groupe A (S.pyogenes) est le principal responsable mais plus rarement aussi le Staphylocoque doré seul ou associé au Streptocoque. Ce travail révèle que les cellules musculaires sont directement ciblées et tuées par Staphylococcus aureus et non par Streptococcus pyogenes, suggérant que l’atteinte musculaire dans le cas de S.pyogenes résulte d’une cause vasculaire (occlusion) et/ou d’une coopération entre les deux bactéries en cas d’infection mixte.

Communiqué du CNRS.

Microscopie électronique en transmission (MET) montrant des bactéries en division (Staphylococcus aureus) dans le cytoplasme de cellules musculaires en culture.  © François Vandenesch
Microscopie électronique en transmission (MET) montrant des bactéries en division (Staphylococcus aureus) dans le cytoplasme de cellules musculaires en culture.© François Vandenesch

Les infections nécrosantes des tissus mous (peau, tissus sous cutané, muscles, etc.) sont des infections invasives et délabrantes extrêmement sévères avec une mortalité élevée malgré un traitement chirurgical toujours nécessaire pour réduire l’étendue du foyer infectieux et supprimer les tissus nécrosés. Ces infections sont notoirement causées par Streptococcus pyogenes (streptocoque du groupe A) et dans de rares cas par Staphylococcus aureus seul ou en association avec le streptocoque. Les cas les plus sévères sont souvent associés à une nécrose musculaire (fasciite nécrosante vulgarisée sous le terme de "bactérie mangeuse de chair").

Les chercheurs ont étudié la virulence des souches de S. pyogenes et de S. aureus issues de ce type d’infection sur des cellules musculaires murines et humaines en culture. L’étude s’est déroulée dans le cadre d’un consortium européen associant des équipes françaises, scandinaves et allemandes ayant permis la constitution d’une importante cohorte de patients présentant ce type de pathologie. Les résultats révèlent que S. aureus est particulièrement virulent pour les cellules musculaires avec des taux d’invasion de ces cellules de l’ordre de 35% alors que ce taux ne dépasse pas 5% avec S. pyogenes. Ce taux extrêmement élevé d’internalisation de S. aureus est associé à un niveau élevé de toxicité pour les cellules musculaire qui est bien moindre dans le cas de S. pyogenes. Les mécanismes de cette internalisation accrue ont été étudiés ; il mettent notamment en jeu une expression accrue à la surface des cellules musculaires des récepteurs cellulaires (intégrines α5-β1) habituellement impliqués dans l’internalisation (à taux faible) de S. aureus dans d’autres cellules eucaryotes.

Les conclusions de l’étude sont doubles : d’une part, elle met en lumière le mécanisme par lequel S. aureus peut entraîner des nécroses musculaires étendues, d’autre part, les mécanismes des délabrement musculaires observés dans les infections à S. pyogenes ne peuvent être la conséquence d’une cytotoxicité directe de la bactérie sur les cellules musculaires mais plus probablement la conséquence d’une occlusion vasculaire par formation de thrombus entraînant un défaut d’oxygénation et la mort cellulaire. Enfin, S. aureus étant souvent associé à S.pyogenes dans ce type d’infection, une synergie entre les deux microorganismes est possible grâce aux mécanismes distincts mise en jeu par ces deux bactéries.

Source : Necrotizing Soft Tissue Infections S.aureus - but not S.pyogenes- isolates display high rate of internalization and cytotoxicity toward human myoblasts.
Baude J, Bastien S, Gillet Y, Leblanc P, Itzek A, Tristan A, Bes M, Duguez S, Moreau K, Diep BA, Norrby-Teglund A, Henry T, Vandenesch F; INFECT Study Group. J Infect Dis. 19 avril 2019. doi: 10.1093/infdis/jiz167.

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