Séance organisée par Florian Mahot-Boudias
Poésie et Histoire forment dans la modernité un couple pour le moins surprenant. Le genre poétique, à partir de la seconde moitié du XIXe siècle, va bien souvent de pair avec un refus de l’histoire : Baudelaire affirme que le coup d’État de Louis Napoléon Bonaparte l’a « physiquement dépolitiqué » et les symbolistes européens refusent le récit et de la référence historique. Cette logique culmine avec le concept de poésie pure diffusé en Europe dans l’entre-deux-guerres. Le poète refuse l’histoire positiviste et voue un culte à l’imagination, sinon à la pensée. Mais si les poètes ont mis au défi la parole narrative, ils la réintègrent souvent subrepticement dans la forme. L’étude fondatrice de Dominique Combe, Poésie et récit, a mis en valeur les tensions entre le narratif et un genre poétique fondé sur la condamnation mallarméenne de « l’universel reportage ». Et pourtant, comme l’a soutenu Jacques Rancière, le poète est au centre de l’expression du drame de l’histoire dans les moments de crise : que l’on pense à Hugo, dans Châtiments, à Éluard et Aragon résistants érigés en mythe national, à Celan et l’expression du souvenir de la Shoah. Le poète accompagne l’histoire de son discours, proféré ou chanté. Les soubresauts de l’épopée aux XIXe et XXe siècles en témoignent. Les avant-gardes vouent aussi un culte à l’histoire, dans la profanation du passé et dans la sacralisation de l’avenir. Du surréalisme aux pratiques contemporaines, littéralistes et critiques, les poètes pensent leur inscription dans l’histoire pour la critiquer et agir sur son cours.
Cette demi-journée se propose d’élaborer les liens qui peuvent unir la poésie et l’histoire dans la modernité, dans une approche à la fois théorique et contextuelle.
Programme :
14h-14h30 : introduction par Florian MAHOT-BOUDIAS (doctorant Université Paris Ouest Nanterre)
14h30-16h30 : communication de Jasmine GETZ (MCF littérature française Université de Lille III)
16h30-17h Lectures de textes poétiques
Salle F103