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Agenda de l'ENS de Lyon

Au-delà de l'intellectualisme analytique danto-goodmanien : vers une esthétique cognitive de type énactif.

Date
ven 09 oct 2020
Horaires

14h

Visioconférence

Intervenant(s)

Mme Alice DUPAS, du laboratoire IRHIM, sous la direction de M. Jean-Michel ROY

Organisateur(s)
Langue(s) des interventions
Description générale

À son niveau le plus général, l'objet de la thèse est de défendre une conception cognitive de l'art qui s'alimente au développement de l'entreprise des sciences cognitives contemporaines, et plus précisément au courant récent dit de la cognition "4E", dont le travail s'attache à dégager les principes généraux d'une version spécifique appelée énactivisme de type sense-making. Par là, il cherche notamment à dépasser les insuffisances de la théorie de l'art proposée au sein du courant de l'esthétique analytique par les philosophes Nelson Goodman et Arthur Danto dans la seconde moitié du XX siècle, qu'il interprète comme une théorie cognitive, et à ce titre bien orientée, mais péchant par une perspective trop intellectualiste sur la cognition. Enfin, cet effort pour développer une approche cognitive énactive de type sensemaking qui rétablisse les pleins droits d'éléments non intellectuels au sein même de la cognition est concentrée sur ce moment clef du processus artistique qu'est la réponse artistique ou appréhension de l'œuvre.

Le travail commence ainsi dans sa première partie par défendre l'idée que la grande rupture que l'art plastique a connu en Europe dans la seconde partie du XIX, et qui est traditionnellement désignée comme la naissance de l'art moderne, correspond en fait fondamentalement à l'émergence d'une conception cognitive de la nature de l'art. À son niveau le plus général, cette conception cognitive se caractérise par le rôle essentiel nouveau qu'y joue la conception au détriment de l'affection (le plaisir esthétique) et de la perception, et se voit baptisée pour cette raison d'approche conceptualisée de l'art. Plusieurs moments dans le déploiement de cette approche conceptualisée sont distingués et l'idée est défendue que ce déploiement est mu en outre par un processus de radicalisation. L'Art Conceptuel est ainsi présenté comme sa phase paroxysitique, correspondant à celle d'un art ultra conceptualisé et résultant d'une radicalisation du moment de l'Art d'Avant-Garde, correspondant à celle d'un art fortement conceptualisé au sein duquel deux étapes sont elles-mêmes distinguées, et du moment de l'Art Moderne, catégorisé quant à lui comme un art mesurément conceptualisé. 
Après avoir étayé par une analyse générale de l'idée d'art cognitif cette interprétation du développement depuis le dernier quart du XIX siècle de l'art plastique dans, qui se trouve dès lors désigné du nom d'art de la post-rupture ou - reprenant une appellation de l'artiste et théoricien Barnett Newman - d'art "plasmique",  le travail examine la double théorie cognitive de la nature de l'art qu'en ont tirée eux-mêmes les philosophes Goodman et Danto, qui s'inscrivent dans le courant de l'esthétique analytique. La thèse se trouve à son tour développée que, au-delà des différences qui les séparent, ces deux philosophes ont bien compris le caractère fondamentalement cognitif de la conception de la nature l'art qui animait l'art plasmique et en ont fourni les premières théorisations pertinentes. Toutefois, ces théorisations se voient reprochées plusieurs imperfections et insuffisances, qui tiennent principalement à ce que ces deux théoriciens opèrent dans leurs analyses avec une conception inadéquate de la cognition. Cette inadéquation tient principalement à son caractère intellectualiste, qui conduit Goodman et Danto à faire du moment paroxystique de l'art conceptuel le moment où, dans le processus de développement de l'art plasmique, se révèle de la façon la plus parfaite cette nature cognitive de l'art.
Contre cette perspective, la thèse s'engage alors dans un mouvement de défense d'une approche moins intellectualisée de la cognition qui débouche sur une conception de la nature cognitive de l'art redonnant ses droits au corps (Embodiedness), et à partir de là à l'émotion (Emotiveness), à la complexité et l'intensité des rapports entre le processus artistique et l'environnement où il prend place (Enactiveness) ainsi qu'à leur rôle constitutif pour ce processus (Extendedness). Cette approche débouche ultimement sur une appréciation différente du moment du déploiement de l'art plasmique où se manifeste dans sa pureté la véritable dimension cognitive de l'art, localisé non pas dans l'Art Conceptuel, qui se trouve même considéré comme sortant en fait de l'art en raison de son intellectualisme radical, mais dans ceux de l'Art moderne et de l'Art d'avant-garde, qui en manifestent des formes diverses.
L'établissement de ces thèses se fait en deux temps. La seconde partie du travail s'attache à dégager les grands principes d'une version personnalisée de l'approche 4E de la cognition sur la base d'un examen critique des principales formulations qui en ont été proposées et d'une tentative de synthèse. Cette version est appelée énactivisme sense making en raison du caractère déterminant qu'y joue le principe de l'énactivisme et de la nature particulière qui lui est reconnue. La troisième partie s'attache à appliquer ce cadre général au cas particulier de la réponse artistique, en capitalisant là encore de façon critique sur différents travaux qui se sont déjà engagés dans la même perspective.

Gratuit

Mots clés

Disciplines