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Actualité de l'ENS de Lyon

Avec ou sans eau ? Les causes multiples des séismes profonds

Vignette Sismique
Actualité
 

Publication de Bruno Reynard (LST) dans Geophysical Research Letters

Bruno Reynard est chercheur au LST (Laboratoire de Science de la Terre) en cotutelle CNRS/ENS/Lyon1. Les plaques océaniques sont enfouies à l'intérieur de la Terre dans les zones de subduction. La croûte océanique y est le siège de nombreux séismes alignés grossièrement dans un plan d'une dizaine de kilomètres d'épaisseur jusqu'aux environs de 200 kilomètres de profondeur. L'origine de ces séismes est attribuée aux transformations des minéraux hydratés de la croûte quand ils sont chauffés et pressurisés au fur et à mesure de l'enfouissement. Ces transformations libèrent de l'eau qui peut aider à la rupture séismique des roches. Environ 15 à 30 kilomètres au-dessous de la croûte océanique existe un second plan de séismicité, découvert il y a une trentaine d'années, et dont l'origine reste débattue (Figure 1). Et c'est là que les avis des chercheurs divergent. Pour certains, la lithosphère océanique a été pénétrée profondément (sur environ 30 kilomètres) par de l'eau de mer, formant par réaction avec les roches la serpentine , un minéral riche en eau. La déshydratation de la serpentine pendant la subduction peut alors expliquer la séismicité du deuxième plan. Pour d'autres, il est mécaniquement impossible de faire pénétrer de grandes quantités d'eau au-delà d'une dizaine de kilomètre de profondeur dans le plancher océanique. Le second plan de séismicité peut être alors expliqué par des instabilités mécaniques périodiques dans des roches anhydres, c'est-à-dire avec une quantité d'eau négligeable. Sur la base d'observations sismologiques dans la subduction à l'aplomb du Japon (Fig. 1), Reynard et al. (2010) ont montré que des zones de faible vitesse sismique autour du second plan de séismicité peuvent être expliquées par la déformation plastique de roches anhydres. Cette déformation locale suit des zones de failles à l'endroit où la plaque océanique plongeante se déplie et accumule des contraintes qui se relâchent lors des séismes. L'association de déformations plastiques et de séismicité dans des roches anhydres plaide en faveur de mécanismes d'instabilité périodiques, et d'une faible quantité d'eau présente sous la croûte océanique, limitant ainsi la quantité d'eau recyclée de la surface vers l'intérieur de la Terre. aateb351.jpg   Légende illustration : Image sismique de la subduction sous le Nord-Est du Japon (à gauche). La surface de la plaque plongeante est représentée par le trait noir, les séismes par les points noirs. Les vitesses des ondes de compression (VP en kilomètre par seconde) sont représentées par le code de couleur. Au milieu, la même image avec les deux plans de séismicité soulignés en vert pour la croûte océanique et en rouge pour le second plan. Le second plan est caractérisé par des anomalies de faible vitesses sismiques. A droite, la carte de localisation de la coupe sismique (trait rouge) dans la région de Tohoku. Source : Reynard, B., J. Nakajima, and H. Kawakatsu (2010), Earthquakes and plastic deformation of anhydrous slab mantle in double Wadati-Benioff zones, Geophys. Res. Lett., 37, L24309, doi:10.1029/2010GL045494. Voir aussi : Editor's Choice section, Science, 2011 February 11, 331, 650

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