Outils

Actualité de l'ENS de Lyon

Importance du mouillage dans la vidange d'un réservoir

Image absente
Publication
 

Publication labo de Physique

La preuve par l'image : 3 écoulements réalisés pour des trous de même taille (1,75 mm de rayon) et pour une hauteur initiale de fluide de 10 cmLes "ménisques, qui sont la forme que prend le liquide qui mouille la surface à la sortie du trou, sont différents pour les 3 matériaux. A : trou percé dans une plaque de verre; B : dans une plaque de Plexiglas; C : dans du verre traité pour être hydrophobe. Photo J. Ferrand©
Si on perce le fond d'un réservoir d'eau, le liquide s'écoule. La vitesse à laquelle le réservoir se vide dépend de sa forme, de la taille du trou et de la hauteur initiale de liquide. C'est le B-A-BA de la mécanique des fluides. C'est la Loi de Torricelli (1643). Des enseignants-chercheurs du Laboratoire de Physique de l'ENS de Lyon ont montré que la façon dont le liquide mouillait la surface extérieure du trou à la sortie du réservoir jouait également un rôle important, en particulier quand la taille du trou n’est pas trop grande par rapport à la longueur capillaire du fluide*.
Pour mettre en évidence cet effet, les chercheurs ont réalisé des expériences assez simples. Ils ont construit un réservoir avec une plaque de fond amovible et percée par un trou de taille millimétrique. Le réservoir est rempli avec de l'eau jusqu’à une hauteur donnée et le trou est ouvert. Pour modifier les propriétés de mouillage à la sortie du réservoir, des plaques avec des revêtements externes ayant des affinités différentes pour l'eau ont été utilisées comme plaque de fond du réservoir. Ils ont filmé le jet d'eau sortant du réservoir tout en suivant le taux de drainage. Ils ont ainsi montré que la vitesse de drainage variait en fonction des propriétés de mouillage de la surface extérieure de la plaque de fond, donc en fonction de la forme du ménisque à la sortie du trou (voir photo). Changer le revêtement intérieur de la plaque de fond du réservoir n'a pas d'effet sur la vitesse de drainage.
De manière surprenante, cette vitesse passe par un minimum lorsque la surface extérieure de la plaque de fond du réservoir passe d'hydrophile à hydrophobe. L'effet maximal de ralentissement des écoulements (jusqu'à 20%) est obtenu pour un angle de mouillage statique d'environ 60°. En d’autres termes, le drainage est plus rapide pour les revêtements très hydrophiles (angle de mouillage statique proche de 0°, comme du verre) ou, au contraire, hydrophobes (angle de mouillage statique supérieur à 90°, comme du Téflon), donc des matériaux qui ont des interactions opposées avec l'eau, que pour des revêtements ayant des propriétés de mouillage intermédiaires. Leurs expériences suggèrent que ce comportement non monotone est dû à l’existence du ménisque qui se forme à la sortie du trou.
A l’aide d’un modèle, qui estime la variation de l'énergie cinétique dans le ménisque, ils ont montré que suivant la forme de ce ménisque, il y avait une accélération plus ou moins importante de la vidange du fluide. En particulier, la variation de la vitesse de drainage présente un minimum pour un angle de mouillage statique d'environ 60° ce qui correspond aux variations non-monotones observées dans les expériences. Cette découverte pourrait aider les chercheurs à expliquer pourquoi des réservoirs de forme identique peuvent se vider à des vitesses différentes.
* longueur capillaire : longueur caractéristique pour laquelle les forces capillaires exercées sur un liquide et les forces gravitationnelles sont de même grandeur. Ce sont les forces capillaires qui définissent la taille du ménisque.
Références : Wetting Effect on Torricelli’s Law. Jérémy Ferrand, Lucile Favreau, Sylvain Joubaud, and Eric Freyssingeas, Phys. Rev. Lett. 117, 248002 (2016)

Les auteurs


Membres de l'équipe "Matière et complexité" du laboratoire de Physique de l'ENS de Lyon :
- Jérémy Ferrand, doctorant
- Lucile Favreau, étudiante au département de physique
- Sylvain Joubaud, MCF
- Eric Freyssingeas, MCF

Mots clés