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Actualité de l'ENS de Lyon

Penser les transformations

ENS Lyon Pablo Jensen IXXI
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Du taoïsme aux réseaux sociaux

3 questions à Pablo Jensen, directeur de l'IXXI et organisateur de ce colloque interdisciplinaire ouvert à tous, le 11 décembre 2012 à l'amphithéâtre Descartes.

Le changement - qu'il soit radical comme une révolution, ou lent comme le vieillissement - est un phénomène essentiel dans nos vies; pourtant il reste une énigme pour des disciplines scientifiques privilégiant l'essence des phénomènes, la stabilité. En combinant des éclairages aussi divers que l'approche chinoise du changement, l'évolution biologique ou la conception du temps des historiens, ce colloque a pour objectif d'enrichir notre compréhension des transformations sociales. Cela est essentiel à l'heure où l'avalanche de données personnelles provenant des réseaux sociaux promet de bouleverser nos approches du monde social.
vtte-penser-les-transformations-2_1354639791051-jpgPour ce colloque « Penser les transformations », vous associez des historiens, sociologues, philosophes, sinologues à des physiciens, informaticiens, mathématiciens. Pourquoi ce sous-titre : « Du taoïsme aux réseaux sociaux » ?
Des physiciens, informaticiens, mathématiciens tentent de créer des outils formels pour analyser l'évolution des réseaux sociaux en s'appuyant sur les énormes masses de données disponibles aujourd'hui. Or ils se heurtent à des difficultés énormes, qui ne sont pas à mon avis uniquement techniques mais conceptuelles. Comment penser les transformations quand ces sciences ont privilégié le stable, les formes géométriques parfaites ? Nous devons nous nourrir des apports des savoirs qui ont abordé la question du changement, comme l'histoire bien sûr, mais aussi la biologie de l'évolution et la sinologie car, comme le montre le philosophe François Jullien, la civilisation chinoise ne s'est pas tant posée la question du "quelle est l'essence profonde et stable d'un phénomène ?" mais a donné la priorité au changement, au rythme des saisons, de la respiration.
À l’ENS de Lyon, vous êtes chercheur rattaché au laboratoire de Physique, mais votre occupation principale c’est la direction de l’IXXI, qui a organisé ce colloque. Or l’IXXI n’est pas un laboratoire mais un hôtel à projets, quelle différence ?
Le rôle de l'IXXI est de promouvoir les échanges interdisciplinaires autour de la modélisation de systèmes complexes, par exemple la simulation de l'évolution biologique, la mise en équations des AVC ou encore la cartographie des évolutions des champs scientifiques.
Dans le dernier numéro du magazine scientifique anglais PhysicsWorld vous publiez un article sur le rôle du chercheur dans la société et son rôle de vulgarisateur (The benefits of reaching out), pouvez-vous nous en dire plus...
Un physicien célèbre disait : on ne comprend bien que ce qu'on peut expliquer à sa grand-mère. Ce que je défends dans cette tribune, c'est l'idée que vulgariser, si on le fait sérieusement, c'est s'obliger à mettre en contexte son savoir, avoir un regard réflexif, et donc mieux le comprendre, un peu comme quand on l'enseigne. Le temps qu'on y passe, loin d'être perdu, est bénéfique à long terme, pour le chercheur, et aussi pour la société, qui ne l'oublions pas, finance l'essentiel de nos recherches !
Photo Christine Chaudagne