Journée d’étude internationale du Collegium de Lyon
À l’initiative de Shawn McHale, Phi-Vân Nguyên Jérémy Jammes, François Guillemot
Une partie de la littérature sur la guerre et la formation de l’État vietnamien s’est penchée sur les perspectives du Parti communiste ainsi que sur l’importance de l’effort de guerre dans le Viêt Nam du Nord dans le dénouement de la Première guerre d’Indochine. Cependant, les publications récentes ont montré que les territoires pionniers dans ce qui allait devenir le « Sud-Viêt Nam », loin de suivre au pas les développements politiques, militaires et culturels initiés dans le Nord, constituaient un véritable laboratoire d’expérimentation. Comment les territoires au sud du 17e parallèle ont-ils constitué un front pionnier dans la décolonisation ? Quelle palette d’options politiques, ethno-nationalistes, politico-religieuses s’offrait à un ensemble de populations souvent hétéroclites ? Quels sont les espaces et les milieux investis par les différents groupes, sociaux, politiques, ethniques ou religieux ? Comment la géographie a-t-elle façonné les désirs d’autonomie ? Quels types d’ethnoscape sont à l’œuvre pendant la décolonisation ? Comment les marges, les espaces frontaliers, les territoires d’eau (mangroves, canaux, rivières, fleuves), les forêts ou jungles impactent-ils les groupes sociaux et les projets d’émancipation ?
L’objectif de cette journée d’étude est d’examiner le Viêt Nam du Sud entre 1945 et 1975 comme un laboratoire d’expérimentations, de rivalités, de compétitions, d’alliances plus ou moins éphémères et parfois contre-intuitives dans l’accès au pouvoir et la réalisation de leur programme politique autonomiste voire indépendantiste. Le « Sud » du Viêt Nam s’est depuis toujours distingué par son dynamisme économique, sa diversité ethnique et culturelle intégrant d’anciens royaumes (Cam, Khmer) et des populations transfrontalières (Jorai, Mnong, Khmer, Chinois d’outre-mer) et, bien entendu, d’une implantation française plus ancienne. Par conséquent, la fin ou la transformation imminente du pouvoir colonial, annoncée depuis la fin – ou sans doute déjà depuis le début – de la Seconde Guerre mondiale, ouvrait de nouveaux horizons, de nombreuses utopies et désirs d’autonomie.
À travers ce « Sud » aux multiples facettes, au-dessous du 17e parallèle, de nombreux groupes – politiques, ethniques, religieux – se sont emparés de l’opportunité d’une telle période de remise en question de l’ordre colonial français, de pressions communistes du Nord et des débuts de la Guerre froide. Des contestations et des réappropriations se sont déroulées dans un esprit pionnier caractéristique des populations du Sud ou des Hauts-plateaux montagnards. Cette journée d’études propose de jeter un regard nouveau sur la pluralité, l’originalité de la fabrique et la mise en pratique de projets utopistes de « nation » ou d’autonomie relative que le contexte de la guerre ou de l’après-guerre permettait de conceptualiser et mettre en place, dans l’urgence ou à travers un effet d’accélération.
Gratuit
Courriel : françois.guillemot [at] ens-lyon.fr