LIF-3103 : Libertinage(s).

Parler de libertinage(s), c'est évoquer un corpus hétérogène de textes qui mettent en question l'orthodoxie religieuse, sèment le doute dans le champ de la morale et s’en prennent aux (bonnes) mœurs. C'est aussi évoquer un rapport de force, un conflit plus ou moins ouvert entre l'orthodoxie et la voix dissidente. La difficulté tient à une manière d'écrire oblique, qui emprunte volontiers les ressorts du dialogue, de la fiction ou du rêve, tout en maniant l'ironie et la dénégation. Un tel corpus soulève ainsi un certain nombre d'enjeux interprétatifs pour le lecteur moderne.

Conçu comme une exploration des formes écrites du libertinage de la première modernité, ce séminaire allie histoire littéraire, histoire des idées et histoire culturelle et sociale. Il propose d'appréhender l'évolution d'une catégorie complexe entre le 17e et le 18e siècle, en saisissant ses reconfigurations en diachronie à travers l'étude d'un corpus varié allant du roman aux écrits de soi, de la poésie aux textes d'idées, des manuscrits clandestins aux textes publiés. Les enjeux méthodologiques d'une « lecture entre les lignes » seront abordés et confrontés aux réalités de la librairie de l'époque, tandis que l'étude d'une sélection d'œuvres s'accompagnera d'une familiarisation avec les outils de recherche à mobiliser pour aborder un tel corpus. Attentif aux ambivalences d’une écriture souvent construite sur une essentielle instabilité axiologique, le séminaire ne négligera pas la part d’ombre du libertinage, en interrogeant notamment la violence, les rapports de domination et les imaginaires de genre qui irriguent l’imaginaire libertin. Il s'agira ainsi de prendre la pleine mesure des ambiguïtés et des tensions qui parcourent l'espace intellectuel et littéraire de la première modernité, tout en articulant ces réflexions à des problématiques contemporaines qui innervent tant le débat public que la recherche en sciences sociales.