Au croisement d’une sociologie du travail subalterne et d’une sociologie des relations interethniques, cette thèse étudie les conditions de travail et de vie des récupérateurs de déchets à Istanbul. Elle s’appuie sur une enquête ethnographique réalisée auprès de récupérateurs appartenant aux différents groupes ethniques placés en situation minoritaire dans la société turque. L’enquête met en évidence que le secteur de la récupération informelle abrite des travailleurs dont une même précarité ne suffit pas à masquer de notables différences dans les dispositions et les propriétés sociales, dans les trajectoires vers et hors de ce travail disqualifié. La thèse montre d’abord la pluralité des rapports au « sale boulot » et au « boulot sale » ainsi que les écarts des pratiques de travail. Située en bas de l’échelle de prestige social et professionnel, l’activité est mise en sens et exercée différemment par les communautés et par les hommes et les femmes. Les récupératrices sont confrontées toutefois à des difficultés supplémentaires par rapport à leurs collègues masculins. La thèse met ensuite en évidence que l’imputation ou la revendication d’appartenance ethnique devient un référent déterminant qui organise les relations de travail dans le secteur. Ce dernier constitue un espace social et professionnel protégé de l’expérience de la minorisation tout en produisant des hiérarchisations et des logiques d’inclusion et d’exclusion en son sein. Cette étude vise à approfondir la connaissance d’un groupe de travailleurs peu explorés au prisme des dynamiques de genre et d’ethnicité.
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