Outils

Agenda de l'ENS de Lyon

Morphogenèse de la ramification chez la mousse Physcomitrium patens

Date
mar 17 juin 2025
Horaires

14h00

Intervenant(s)

Soutenance de thèse de Jeanne ABITBOL, sous la direction de Yoan COUDERT

Organisateur(s)
Langue(s) des interventions
Description générale

Jeanne ABITBOL soutiendra sa thèse de doctorat en sciences de la vie et de la santé, réalisée sous la direction de Yoan COUDERT, le 17 juin 2025 à 14h.

Résumé de la thèse

La diversité architecturale des plantes terrestres résulte de centaines de millions d'années d'évolution. Avant même la colonisation de la terre ferme, plusieurs innovations fondamentales aux formes de vie végétales ont émergé, telles que la multicellularité et des filaments ramifiés. L'acquisition de tiges feuillées tri-dimensionnelles, et de la ramification dans ce contexte, ont par la suite été des déterminants majeurs de la diversification architecturale des plantes. Les plantes terrestres sont divisées en deux groupes : les bryophytes et les plantes vasculaires, qui ont divergé de leur dernier ancêtre commun il y a environ 500 millions d'années. Parmi ces groupes, les bryophytes semblent avoir conservé davantage de traits ancestraux, en particulier des filaments ramifiés, tout en ayant bénéficié d’innovations évolutives de manière convergente avec les plantes vasculaires, telles que la ramification axillaire, lorsque les branches se développent à l'aisselle des feuilles dans la tige feuillée. L'étude des mécanismes régulant la ramification dans les filaments et la tige feuillée des mousses est donc essentielle à la compréhension de l'évolution de l'architecture des plantes. Dans cette thèse, Jeanne Abitbol étudie ces mécanismes dans l'espèce modèle Physcomitrium patens.

Chez les plantes vasculaires et les mousses, la ramification axillaire est contrôlée par les apex des tiges qui inhibent l'initiation de nouvelles branches à distance. Ce phénomène, appelé dominance apicale, est médié par une hormone végétale, l'auxine. Chez les plantes vasculaires, l'auxine est transportée activement de cellule en cellule par des transporteurs membranaires, générant un flux d'auxine polarisé de l'apex vers la base de la tige. À l'inverse, il n'y a pas de flux polarisé d'auxine dans la tige feuillée des mousses. Au lieu de ça, il a été proposé que la principale voie de mouvement de l'auxine serait symplasmique, c'est-à-dire par diffusion via les plasmodesmes, les canaux qui relient les cellules adjacentes dans les tissus végétaux. Cependant, la diffusion est un mécanisme généralement lent et localisé, et sa suffisance pour établir les gradients d'auxine de longue portée dans la tige des mousses doit être évaluée. De plus, une analyse détaillée des motifs de ramification a mis en lumière une remarquable régularité des espaces inter-branches qui s'établit au cours du développement. Intuitivement, la robustesse de ce motif n'est pas compatible avec un mécanisme d'inhibition basé sur la diffusion. Dans cette thèse, Jeanne Abitbol conçoit un modèle permettant de simuler les dynamiques d'auxine dans une tige idéalisée, construit à partir de mesures biologiques. Cette approche quantitative lui permet de démontrer qu'un mécanisme de régulation de la ramification basé sur la diffusion symplasmique de l'auxine dans la tige feuillée de P. patens est suffisant pour générer les motifs de ramification observés, tant en termes de grandeur caractéristique que de robustesse.

Dans les filaments de P. patens bien que plusieurs acteurs moléculaires de la ramification aient été identifiés, nous manquons d'une compréhension des mécanismes cellulaires gouvernant l’établissement des motifs à l’échelle macroscopique. En couplant analyse de données et modélisation, Jeanne Abitbol montre que l'architecture de filaments jeunes dans les premiers jours de germination de la spore peut être récapitulée par un modèle probabiliste avec quelques règles simples. La comparaison des motifs avec ceux observés dans des filaments prélevés à la périphérie de colonie plus matures révèle que ces règles développementales sont modulées au cours du développement, ouvrant ainsi la voie à de nouvelles recherches visant à caractériser les mécanismes et acteurs moléculaires sous-jacents. 


Branching morphogenesis in the moss Physcomitrium patens

The architectural diversity of land plants is the result of hundreds of millions of years of evolution. Several innovations fundamental to plant life forms emerged before terrestrialization, such as multicellularity and branching in filaments. The acquisition of three-dimensional leafy shoots, and branching in this context, have subsequently been major determinants of the diversification of plant architecture. Land plants are divided into two groups: bryophytes and vascular plants, which diverged from their last common ancestor approximately 500 million years ago. Among these groups, bryophytes appear to have conserved more ancestral traits, in particular branched filaments, while having benefited from evolutionary innovations convergent with vascular plants, such as axillary branching, when branches develop at the axil of leaves in the leafy shoot. Therefore, studying the mechanisms regulating branching in the filaments and leafy shoot of mosses is essential to understand the evolution of plant architecture. In this thesis, Jeanne Abitbol studies these mechanisms in the model species Physcomitrium patens.

In vascular plants and mosses, axillary branching is controlled by shoot apices, which inhibit the initiation of new branches at a distance. This phenomenon, known as apical dominance, is mediated by the plant hormone auxin. In vascular plants, auxin is actively transported from cell to cell by membrane transporters, generating a polar flow of auxin from the apex to the base of the shoot. Conversely, there is no polar auxin flow in the leafy shoot of mosses. Instead, it has been proposed that the main route for auxin movement may be symplasmic, i.e. by diffusion via plasmodesmata, the channels that connect adjacent cells in plant tissues. However, diffusion is generally a slow and local mechanism, and its sufficiency for establishing long-range auxin gradients in the moss shoot needs to be assessed. In addition, detailed analysis of branching patterns has revealed a remarkable regularity of branch spacing that is established during development. Intuitively, the robustness of this pattern is not compatible with a diffusion-based inhibition mechanism. In this thesis, Jeanne Abitbol designs a model to simulate auxin dynamics in an idealized leafy shoot constructed from biological measurements. This quantitative approach enables her to demonstrate that a regulatory mechanism of branching based on symplasmic auxin diffusion in the leafy shoot of P. patens is sufficient to generate the observed branching patterns, both in terms of characteristic length and robustness.

In P. patens filaments, although several molecular actors have been identified, the mechanisms governing patterning at the macroscopic scale remain unclear. By combining data analysis and modeling, Jeanne Abitbol shows that the architecture of filaments at early stages of development from spore germination can be recapitulated by a probabilistic model with a few simple rules. The comparison of the patterns with those observed in filaments taken from the periphery of more mature colonies reveals that these rules are modulated during development, paving the way for new research aimed at characterizing the underlying molecular actors and mechanisms. 

Gratuit

Mots clés

Disciplines