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Actualité de l'ENS de Lyon

Covid-19 : la combinaison infection-vaccination est celle qui protège le mieux d’une réinfection par le SARS-CoV-2

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Communiqué de presse / Publication
 

Publication du CIRI dans la revue Science Translational Medicine le 15 mars 2023. Communiqué de presse de l'INSERM du 17 mars 2023.

 

Une grande partie de la population a développé une immunité contre le SARS-CoV-2 suite à une infection et/ou à la vaccination. En outre, certains patients infectés bénéficient d'une immunité dite « hybride » lorsqu’ils ont été vaccinés après leur épisode infectieux. Des scientifiques de l’Inserm, du CNRS, de l’Université Claude Bernard Lyon 1 et de l'ENS de Lyon au sein du Centre international de recherche en infectiologie (CIRI), cherchent à caractériser l'empreinte laissée par l’exposition au SARS-CoV-2, par la vaccination ou par la combinaison des deux événements sur la mémoire immunitaire. L’objectif ? Mieux appréhender les mécanismes de la réponse immunitaire face au virus afin d’améliorer la prise en charge des patients et d’optimiser les stratégies vaccinales.  Dans une nouvelle étude, les scientifiques ont comparé la mémoire immunitaire d’individus convalescents, vaccinés ou non contre le SARS-CoV-2, avec celle induite par la vaccination chez des individus vaccinés n’ayant jamais été infectés par le SARS-CoV-2. Leurs résultats montrent que les personnes vaccinées après une infection sont les mieux protégées d’une réinfection par le SARS-CoV-2. L’article complet est publié dans la revue Science Translational Medicine.

Notre organisme garde en mémoire les infections qu’il a déjà combattues afin de nous protéger contre une éventuelle réinfection. L’efficacité de la vaccination repose sur une stratégie consistant à simuler une infection pour induire une immunité protectrice, c’est à dire la production de cellules à mémoire « entraînées » à la reconnaissance du pathogène qui pourront protéger l’organisme en cas d’infection.

Dans le cas de la Covid-19, l’immunité est conférée soit par l'infection (immunité naturelle) soit par la vaccination (immunité vaccinale). Certaines personnes bénéficient par ailleurs d'une immunité dite "hybride" puisqu’elles ont été vaccinées après un épisode infectieux.

Pour mieux appréhender les mécanismes précis de la réponse immunitaire face au SARS-CoV-2, des chercheurs et chercheuses de l’Inserm, du CNRS, de l’Université Claude Bernard Lyon 1 et de l’ENS de Lyon, ont comparé différents paramètres de la mémoire immunitaire à partir d’échantillons sanguins récoltés chez des individus porteurs d'une immunité naturelle, d'une immunité vaccinale ou d'une immunité hybride contre le SARS-CoV-2.

Ils se sont plus spécifiquement intéressés à la réponse immunitaire adaptative et plus précisément à la réponse dite humorale (voir encadré ci-dessous).

En savoir plus sur la réponse immunitaire adaptative

La réponse immunitaire adaptative se met en place quelques jours après le contact avec l’agent pathogène, contrairement à l’immunité innée qui elle est immédiate.

On peut distinguer deux grandes catégories de réponse immunitaire adaptative.
- Les réponses dites cellulaires sont fondées sur la reconnaissance et la destruction des cellules infectées par les lymphocytes T cytotoxiques (tueurs).
- Les réponses dites humorales sont fondées sur la production d’anticorps par les lymphocytes B. Ces anticorps reconnaissent le pathogène et le neutralisent pour l’empêcher d’infecter les cellules cibles.

La mémoire immunitaire humorale comporte deux compartiments :
- La mémoire « sérologique » estimée par les taux d’anticorps circulants produits par les « plasmocytes à mémoire ». Ces anticorps permettent de créer une barrière susceptible de prévenir la réinfection.
- La mémoire cellulaire constituée par les « lymphocytes B à mémoire » qui ne sécrètent pas d’anticorps mais peuvent se différencier de manière rapide et massive en plasmocytes pour générer une nouvelle production d’anticorps amplifiée. Ces lymphocytes B à mémoire sont sollicités lorsque la barrière d’anticorps produits par les plasmocytes à mémoire est déficiente ou insuffisante.

Les résultats indiquent que six mois après la dernière injection vaccinale ou après infection, les personnes qui présentent une immunité hybride sont celles qui ont les plus forts taux d'anticorps neutralisants dans le sang.

Au-delà de cette variation quantitative de la mémoire sérologique, les auteurs montrent également que l'immunité hybride induit une modification qualitative de la mémoire cellulaire constituée par les lymphocytes B. Celle-ci se traduit par la multiplication du nombre de certains lymphocytes B à mémoire porteurs de récepteurs permettant leur relocalisation au niveau des muqueuses respiratoires et intestinales. Ce dernier point suggère que l’immunité hybride pourrait conférer une meilleure protection aux sites de pénétration du virus SARS-CoV-2.

"Dans leur ensemble, les résultats de cette étude démontrent la supériorité de l’immunité hybride sur toutes les autres formes d’immunité. Ils soulignent l’importance de continuer à inclure les individus préalablement infectés dans les campagnes de vaccination", explique Thierry Defrance, chercheur Inserm et dernier auteur de l’étude.

"Enfin, cette étude nous rappelle que les taux d’anticorps sériques sont certes un marqueur important de l’immunité, mais ne constituent pas le seul déterminant d’une immunité protectrice. D’autres composantes de la mémoire immunitaire, lymphocytes T mais aussi lymphocytes B à mémoire peuvent induire un rebond de la sécrétion d’anticorps lorsqu’elles sont stimulées par le virus", ajoute Thierry Defrance.

 

Figure
Visualisation en microscopie électronique d’une cellule infectée par le SARS-CoV-2.
©Philippe Roingeard, Anne Bull-Maurer, Sonia Georgeault/Inserm.licence CC-BY-NC 4.0 international

 

Référence : Prior SARS-CoV-2 infection enhances and reshapes spike protein–specific memory induced by vaccination. Veronique Barateau, Loic Peyrot, Carla Saade, Bruno Pozzetto, Karen Brengel-Pesce, Mad-Helenie Elsensohn, Omran Allatif, Nicolas Guibert, Christelle Compagnon, Natacha Mariano, Julie Chaix, Sophia Djebali, Jean-Baptiste Fassier, Bruno Lina, Katia Lefsihane, Maxime Espi, Olivier Thaunat, Jacqueline Marvel, Manuel Rosa-Calatrava, Andres Pizzorno, Delphine Maucort-Boulch, Laetitia Henaff, Mitra Saadatian-Elahi, Philippe Vanhems, Stéphane Paul, Thierry Walzer, Sophie Trouillet-Assant, Thierry Defrance. Science Translational Medicine, 15 mars 2023.
DOI : 10.1126/scitranslmed.ade0550

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