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Actualité de l'ENS de Lyon

Découverte de l’étoile la plus distante jamais observée

Icare
Communiqué de presse / Publication
 

Publication des travaux du Centre de Recherche Astrophysique de Lyon (Université Claude Bernard Lyon 1 / CNRS / ENS de Lyon) dans la revue Nature Astronomy.

Située à l’autre bout de l’Univers, l’étoile bleue Icare vient d’être identifiée grâce aux images du télescope spatial Hubble. Il s’agit de l’étoile individuelle la plus distante jamais observée à ce jour : sa lumière a mis neuf milliards d'années pour venir jusqu’à nous ! C’est un phénomène d’amplification naturelle de la lumière qui a rendu possible cette observation aussi extraordinaire qu’inattendue.

Communiqué de presse UCBL / CNRS / ENS de Lyon

Une source de lumière inattendue
En 2016, l’équipe d’astronomes, qui recherchait alors des signatures de supernovae [1], repère "par hasard", sur les images d’un amas de galaxies prises avec Hubble, une nouvelle source ponctuelle de lumière inattendue. Cette lumière présente la particularité d’augmenter fortement en intensité dans le temps, triplant en luminosité en à peine un mois. Les couleurs et la variation de lumière de cette source indiquent rapidement qu’il s’agit d’une seule étoile bleue, supergéante, dont la lumière a mis neuf milliards d’années pour venir jusqu’à nous. À cette distance, une étoile individuelle ne peut pas être directement observée, même par les télescopes les plus puissants : il est impossible de la distinguer des milliards d’autres étoiles qui appartiennent à sa galaxie. Cent fois plus éloignée que l’étoile individuelle la plus distante connue jusqu’à ce jour, il est pourtant possible d’observer Icare. Comment cette étoile a-t-elle pu être identifiée ?

Un mirage à l’échelle de l’Univers
C’est grâce à sa brillance inhabituelle causée par un phénomène d’amplification, appelé "effet de lentille gravitationnelle" [2], qu’Icare a pu être révélée. Il s’agit d’un effet d’optique provoqué par l’amas de galaxies massif situé sur la ligne de visée entre le télescope et l’étoile Icare. Les astrophysiciens, dont un chercheur du Centre de Recherche Astrophysique de Lyon, ont réussi à déterminer l’origine de cette amplification, qui atteint ici un facteur d’au moins 2000. Ce sont les étoiles présentes dans l’amas de galaxies situé en avant-plan qui sont responsables de cet effet. De petits grumeaux de masse, dans ce même amas, sont également à l’origine de plusieurs "sursauts" dans la luminosité amplifiée de l’étoile au cours du temps. Ce phénomène de sursaut, aussi appelé microlentille, pourrait permettre de nous éclairer sur la mystérieuse matière sombre : une matière invisible qui constituerait la majorité de la masse de l’Univers. Il a en effet permis de tester l’une des théories concernant la nature de la matière sombre contenue dans l’amas de galaxies. Les chercheurs ont clairement mis en évidence que l’hypothèse selon laquelle la matière sombre serait sous la forme d’un grand nombre de trous noirs, nés à la naissance de l’Univers, n’était pas applicable à l’amas dans lequel se trouve Icare.

La découverte de l’étoile Icare ouvre de nouvelles perspectives pour l’observation et l’étude d’étoiles individuelles dans l’Univers lointain. Avec l’avènement du futur télescope James Webb, le successeur d’Hubble, les astronomes s’attendent à détecter davantage de phénomènes de ce type, avec encore plus de détails : une voie plus que prometteuse pour la compréhension de notre Univers.

Icare
Images du télescope Hubble. À gauche, l’amas MACS J1149+2223 dans lequel a été observée l’étoile Icare. Les images de droite montrent un zoom avec l’apparition, en 2016, de l’étoile Icare dans cet amas (flèche). Celle-ci était complètement invisible dans les observations prises en 2011. © NASA, ESA, and P. Kelly (University of Minnesota)


[1] Les supernovae sont des explosions d’étoiles très intenses.
[2] L’effet de lentille gravitationnelle appelé aussi « mirage gravitationnel » est un phénomène qui déforme et amplifie les rayons lumineux qui passent à proximité d’un objet massif, ici un amas de galaxies, en les faisant converger vers l’observateur.

Source : Patrick L. Kelly et al., An individual star at redshift 1.5 extremely magnified by a galaxy-cluster lens, Nature Astronomy, 26 mars 2018.

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