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Actualité de l'ENS de Lyon

Encapsuler à façon et durablement grâce aux interactions électrostatiques

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Publication
 

Publication du Laboratoire de Physique dans la revue Physical Review Applied le 6 juillet 2022. Communication du CNRS-INP du 7 juillet 2022.

Les mousses telles que des bulles d’air dans l’eau font appel à des tensioactifs ou à des particules solides qui stabilisent les interfaces air–eau. Grâce à la modélisation des interactions entre des tensioactifs chargés et des particules de charges opposées, les physiciens ont conçu et mis au point une méthode simple et originale d’encapsulation des bulles qui leur assure une grande longévité.

Les mousses, par exemple celles que l’on génère avec de l’eau savonneuse, sont composées de bulles d’air séparées par des films minces d’eau, la présence de savon stabilisant l’interface air - eau des bulles. Un tel produit stabilisant est un tensioactif, composé de chaines d’atomes qui possèdent une extrémité polaire ayant une forte affinité avec l’eau et une extrémité non polaire, au contraire hydrophobe. Les bulles d’air sont alors "encapsulées" par ces extrémités hydrophobes des molécules du tensioactif. Il y a plus d'un siècle, Carie Everson, et plus tard Walter Ramsden et Spencer Pickering, ont observé que des particules en suspension jouaient dans certaines conditions le même rôle stabilisant et leurs travaux suggèrent qu’un effet hydrophobe similaire est à l’œuvre. Cette méthode de stabilisation, communément appelée méthode de Pickering, demande néanmoins un ajustement parfois délicat de l’hydrophobicité des particules, celle-ci étant de plus facilement altérée lors de manipulation. Par ailleurs, la compréhension des effets dits hydrophobes et la description précise des interactions des particules avec la bulle avant leur attachement à sa surface sont toujours des questions ouvertes.

Dans ce travail, en tirant profit des interactions électrostatiques entre des tensioactifs chargés et des particules ou des molécules ayant des charges opposées, les physiciens du Laboratoire de Physique de l’ENS de Lyon (LPENSL, CNRS / ENS de Lyon) proposent une nouvelle méthode d’encapsulation (figure), facile à mettre en œuvre et très efficace. Ils décrivent de façon quantitative ces phénomènes par la théorie dite DLVO, habituellement utilisée pour décrire les interactions de particules chargées en suspension, qui est ici utilisée pour décrire les interactions (électrostatiques et de van der Waals), au sein du système bulles – particules. Ces résultats sont publiés dans Physical Review Applied.

Cette méthode est très versatile et s’applique en principe aussi bien à des bulles qu’à des gouttelettes. Les diverses capsules ayant été réalisées sont extrêmement stables, parfois depuis plusieurs années. De plus, l’encapsulation peut être réversible ou irréversible selon les cas (figure). La simplicité de mise en œuvre du concept et la compréhension des interactions en jeu sont des atouts importants en vue des nombreuses applications industrielles potentielles (alimentation, cosmétiques, pharmaceutique, etc.).

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Schéma de la bulle entourée d’une couche de tensioactif chargé positivement. Les brins verts représentent les chaines hydrophobes. En jouant sur le pH et en ajoutant dans la solution des particules (par exemple des billes de verre) ou des ions silicatés, la bulle va s’entourer respectivement d’une rangée de particules auto-assemblées ou d’un gel de silicate (en gris). Dans le cas du gel, la coque formée est chimiquement résistante et l’encapsulation est irréversible.
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Image par microscopie électronique à balayage d’une capsule de billes de verres ouverte montrant l’assemblage des billes de verre nanométriques. L’expérience a lieu à basse température (cryomicroscopie) pour ne pas détruire la capsule avec le faisceau d’électrons.

 


Dans les médias :

Référence : Microbubble Encapsulation by Electrostatic Templating with Ionic Surfactants. Vance Bergeron, Ramon Planet et Stéphane Santucci. Phys. Rev. Applied, 6 juillet 2022.
DOI : https://doi.org/10.1103/PhysRevApplied.18.L011001

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