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Actualité de l'ENS de Lyon

Se séparer pour survivre

Plantule © Nicolas Doll
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La gaine embryonnaire est une couche de glycoprotéines entourant l’embryon qui a été décrite chez la plante modèle Arabidopsis thaliana. Dans un article publié dans la revue Current Biology, les chercheurs ont montré que la gaine embryonnaire se maintient sur la surface de la jeune plantule après germination. Cette gaine possède des propriétés antiadhésives très fortes ce qui facilite la sortie de la plantule de la graine et permet ainsi un développement plus robuste de la jeune plante.

Photos de plantules 3 jours après germination
Haut : Photos de plantules 3 jours après germination.
À gauche : plantule sauvage avec gaine embryonnaire. À droite : plantule mutante dépourvue de gaine embryonnaire.
Bas : Photos au microscope optique de plantules deux jours après germination chez lesquelles la gaine embryonnaire a été immunomarquée en vert. À gauche : une plantule sauvage avec gaine embryonnaire. À droite : une plantule mutante dépourvue de gaine embryonnaire. © Nicolas Doll

Chez les plantes à graines, la germination est une étape critique pour la jeune plante qui émerge du milieu protégé de la graine et entre au contact des conditions stressantes du milieu extérieur. Jusqu’il y a peu, les scientifiques pensaient que la première interface entre le milieu extérieur et la plantule était la cuticule, une couche hydrophobe qui entoure et protège les tissus aériens des plantes, notamment de la déshydratation. Cependant, les chercheurs démontrent ici que, chez l’arabette des dames (Arabidopsis thaliana), une petite plante de la famille du chou très étudiée par les biologistes moléculaires, cette première interface est en réalité la gaine embryonnaire. Cette couche de glycoprotéines est produite par l’albumen (le tissu de réserve entourant l’embryon dans la graine) et déposée à la surface de l’embryon, séparant ainsi physiquement ces deux tissus. Alors qu'on pensait que la gaine embryonnaire restait à l’intérieur de la graine, les auteurs ont montré qu’elle se maintient sur les parties aériennes de la jeune plantule après la germination avant de se fragmenter lorsque les tissus grandissent.

Pour étudier les caractéristiques et les fonctions de cette couche, ils ont utilisé un mutant chez lequel la gaine embryonnaire est absente et l’ont comparé à un type sauvage qui possède une gaine embryonnaire fonctionnelle. En analysant au microscope à force atomique les propriétés physiques de la surface des plantules sauvages et mutantes, ils ont pu montrer que la gaine embryonnaire possède une très faible adhésivité. Cette propriété permet de faciliter la sortie des cotylédons (les deux feuilles embryonnaires) de la graine. En effet, dans un mutant sans gaine embryonnaire, les cotylédons ont du mal à s’extraire de la graine et y restent plus longtemps retenus (voir figue ci-dessous). De plus, les chercheurs ont montré que les plantes possédant une gaine embryonnaire sont plus compétitives et plus robustes au début de leur développement que les mutants qui en sont dépourvus  Bien que l’étude porte uniquement sur A. thaliana, il est possible que cette structure soit également présente chez d’autres plantes. La rétention des manteaux de la graine sur les cotylédons étant problématique pour la culture de certaines espèces comme le poivron, l’étude de la gaine embryonnaire chez ces espèces pourrait conduire à des applications agronomiques.

Source : The Endosperm-Derived Embryo Sheath Is an Anti-adhesive Structure that Facilitates Cotyledon Emergence during Germination in Arabidopsis. Doll NM, Bovio S, Gaiti A, Marsollier AC, Chamot S, Moussu S, Widiez T, Ingram G. Current Biology, 9 mars 2020.

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