Outils

HISF5120 : Histoire médiévale : villes et construction étatique en Europe du nord-ouest du XIIIe au XVe siècle (Empire, anciens Pays-bas, France, Angleterre)

HISF5120 : Histoire médiévale : villes et construction étatique en Europe du nord-ouest du XIIIe au XVe siècle (Empire, anciens Pays-bas, France, Angleterre)

Medieval history: towns and state construction in north-western Europe from the 13th to the 15th centuries century (Empire, former Netherlands, France, England)

Responsable(s) :
  • Frederic Abecassis
  • Claire Fauchon
Enseignant(s) :
  • Sylvain Gouguenheim

Niveau

M2

Discipline

Histoire

ECTS
4.00
Période
1e semestre
Localisation
Site Descartes
Année
2022

Public externe (ouverts aux auditeurs de cours)

Informations générales sur le cours : HISF5120

Content objectif

Situé au coeur d’une historiographie foisonnante, issue de travaux fondateurs sur les expériences européennes de l’État, le programme d’histoire médiévale invite candidates et candidats à réfléchir au rôle et à la place des villes dans la construction des formes étatiques au sein d’un espace offrant de multiples exemples de centralisation et de décentralisation du pouvoir.

C’est à une vaste réflexion sur la circulation des modèles politiques, envisagée dans la relation réciproque unissant monde des villes et autorité centrale, que s’adosseront les thématiques classiques permettant d’évaluer les modalités d’élaboration des structures et de l’idéologie étatiques. À partir du début du XIIIe siècle, l’affirmation de la puissance économique des villes a contribué à faire d’elles des actrices essentielles dans la transition progressive des cadres féodaux du pouvoir vers des formes complexes et diverses de l’expression de la souveraineté. En privilégiant le dialogue constant qui équilibre coups de force et compromis, la montée en puissance des armatures de l’État en gestation, sous la forme de fédération, de principauté, de royaume et d’empire, sera observée. Les villes, véritables laboratoires politiques, ont pu non seulement éprouver des outils du pouvoir étatique mais également expérimenter un vaste éventail de formes de gestion et d’administration qui, à leur tour, ont inspiré, nourri, orienté les cadres de l’autorité supérieure alors en développement. De ce point de vue, on sera attentif à la diversité des statuts juridiques, à la concentration, la taille ou la mise en réseau de ces villes qui influent sur la qualité du lien avec les rois, les princes, les empereurs et leurs représentants. La fin du XVe siècle, marquée par la résolution de la guerre de succession de Bourgogne (1482), la mort de Louis XI (1483), la fin de la guerre civile anglaise (1487) et la diète de Worms (1495), propose un terminus ad quem qui, dans chaque espace envisagé, correspond à un 

tournant marqué par l’affirmation des monarchies en France et en Angleterre, la mise en place de nouvelles institutions politiques dans l’Empire et l’entame d’une partition politique inédite pour les anciens Pays-Bas.

Les espaces considérés offrent une large palette des possibles en Europe, depuis les villes autonomes ou auto-administrées des complexes territoriaux décentralisés jusqu’aux bonnes villes inféodées au pouvoir dans les États centralisés. Pour illustrer cette approche kaléidoscopique, l’espace correspondant à l’Angleterre, aux principautés des anciens Pays-Bas (Flandre, Brabant, Hainaut, Hollande, Zélande, Namur, Liège et Luxembourg), au royaume de France au nord de la Loire, en ajoutant les duchés de Berry et de Bourbon, à la grande principauté de Bourgogne, et à l’Empire (Haute Allemagne, y compris l’espace de la Confédération, la Rhénanie, la Lorraine et la Hanse jusqu’à Lübeck) offrira des études riches et propres à l’histoire comparée que sous-tend ce programme. L’inscription dans l’Europe du Nord-Ouest permet de cibler une koinè culturelle, moins marquée que la France méridionale ou l’Italie par l’héritage de la romanité dans le développement de ses structures gouvernementales.

L’Europe du Nord-Ouest ainsi définie s’engage entre XIIIe et XVe siècle dans une dynamique économique faisant la part belle à une bourgeoisie en mesure de rejoindre les rangs des cadres dirigeants et d’assurer la transmission des usages et des techniques du pouvoir, dans un sens comme dans l’autre. On accordera donc une attention particulière à toutes les modalités de dialogue qui sont au coeur de ces échanges entre villes et États rythmés par les réunions en assemblées, les cérémonies du pouvoir, la circulation de l’information (ambassades, correspondance, manifestes, rumeurs…) et qui forgent la dimension contractuelle du politique. Cette dernière sera envisagée tant du point de vue de l’histoire sociale (circulation des officiers, rôle des courtiers du pouvoir, des diplomates) que de l’histoire institutionnelle abordée par la formalisation d’écrits spécifiques tels les privilèges, les ordonnances, les serments, qui pavent la voie de la constitutionnalisation. Ainsi, on analysera autant les instruments permettant au pouvoir princier ou royal de contrôler les villes que les leviers activés par ces dernières pour peser sur les choix politiques opérés par l’instance supérieure. L’étude ne fera pas l’économie des manifestations violentes, des actes d’opposition, de rupture et d’alerte que sont les émeutes et les révoltes urbaines. À l’autre extrémité du spectre des relations avec l’autorité centrale, les liens privilégiés exprimés dans le cadre des bonnes villes ou des villes libres et impériales seront à considérer.

Les marques de l’autorité supérieure en ville permettront d’aborder la question des résidences, de l’itinérance des princes et de leur cour, de la capitale et de la communication symbolique. L’écriture de l’histoire sera incluse dans la réflexion, dans la mesure où elle manifeste l’ancrage des villes dans une entité politique plus vaste ou, au contraire, magnifie leur liberté. Si les échanges commerciaux ne constituent pas un thème en soi, la puissance économique des villes, à l’origine de l’exercice de leur légitimité politique, et leur participation à l’impôt seront des angles d’observation à prendre en considération. De même, dans un contexte de guerre permanent, qu’il soit international ou interne aux pays concernés par le programme, l’investissement, le positionnement et les choix partisans des villes permettront de saisir, lors des épisodes critiques, combien leur ralliement s’impose comme un enjeu de taille dans les compétitions de pouvoir.

Ainsi défini, ce programme fait écho au thème 2 de la classe de cinquième (« Société, Église et pouvoir politique dans l’Occident féodal (XIe-XVe siècles) : « L’émergence d'une nouvelle société urbaine » et « L’affirmation de l’État monarchique dans le royaume des Capétiens et des Valois »). La ville, flux de ressources et de services, moteur de la mobilité sociale, destin forgé et consolidé par le pacte, « opératrice de mémoire », s’impose pendant toute la période considérée comme un enjeu de médiation et de validation des États en construction, quelle que soit leur forme.