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Cartographie de la chimie du manteau terrestre

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Publication
 

Publication du LGL-TPE dans la revue PNAS le 21 novembre 2022. Communication du CNRS-INSU du 7 décembre 2022.

 

Dans les années 1980, les observations géochimiques ont conduit des chercheurs à proposer un modèle géodynamique de structure marbrée du manteau terrestre(1). Une équipe de scientifiques, dont certains rattachés au Laboratoire de Géologie de Lyon : Terre, Planètes, Environnement (LGL-TPE, CNRS/ENS de Lyon/Université Claude Bernard Lyon 1) s’y est intéressée en utilisant le point de vue de la sismologie.

Comme la subduction de plaque océanique est en cours depuis 2 à 3 milliards d'années, la majeure partie du manteau serait aujourd’hui un mélange de croute océanique à composition basaltique et d’un manteau harzburgitique. L’échelle et la distribution de ces hétérogénéités chimiques restent toutefois mal contraintes(2) . Dans la zone de transition de 410 à 660 km sous nos pieds, les propriétés réfléchissantes de discontinuités sismiques, ayant pour origine des transitions de phase minéralogique, peuvent servir à contraindre la composition du manteau. Ainsi, les progrès récents dans la modélisation des propriétés élastiques à haute pression et haute température montrent que l’énergie ré-émise par ces discontinuités est contrôlée par la quantité de basalte présente dans le mélange de manteau.

En cartographiant à l’échelle globale les propriétés réfléchissantes de ces discontinuités, l’équipe scientifique a pu révéler l'existence de roches aux propriétés élastiques anormales entourant l'océan Pacifique. Leurs simulations numériques suggèrent que ces poches de matériaux peuvent s'expliquer par des concentrations anormalement élevées de roches à composition basaltique. La répartition géographique de ces matériaux suggère que le principal mécanisme de formation serait la ségrégation de croûte océanique des plaques océaniques en subduction.

Les scientifiques ont aussi estimé le temps nécessaire pour reconstituer le réservoir dans la zone de transition : une échelle de temps de 700 millions d'années serait nécessaire, ce qui est environ 7 fois plus long que le temps nécessaire aux plaques subductées pour atteindre, depuis la surface, la limite entre le noyau et le manteau. Cela signifie que la composition actuelle du manteau, dans la zone de transition, est le résultat de plusieurs cycles de subduction, de ségrégation et d’accumulation. Il existe donc un mécanisme pour maintenir l’intégrité physique des deux composantes basaltique et harzburgitique et ce mécanisme conduit à la formation de larges réservoirs géochimiques dans la zone de transition du manteau. Les scientifiques espèrent généraliser leur approche à une variété d'ondes sismiques afin d’affiner à l'avenir la compréhension des mécanismes de mélange et de ségrégation des différents types de roches du manteau.

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Carte de la chimie du manteau obtenue à 410-660 km de profondeur. Les anomalies en jaune indiquent un enrichissement en matériau de composition basaltique, avec comme origine probable le détachement de la croute océanique des plaques océaniques subductées. L’emplacement des fosses de subduction dans le passé entre aujourd’hui et 200 millions d’années est symbolisé par des lignes rouges.
© LGLTPE

 


Notes

  1. Dans le modèle proposé par Claude Allègre et Donald Turcotte, la lithosphère océanique en subduction serait étirée et amincie par les contraintes dans le manteau en convection. La longueur d'onde spatiale des hétérogénéités diminuerait ainsi progressivement, et les bandes résultantes seraient finalement détruites soit par fusion partielle au niveau des dorsales océaniques, soit par dissolution à l’échelle décimétrique.
  2. La convection à l’échelle globale conduit-elle à un manteau relativement homogène, ou bien au contraire existe-t-il des mécanismes pour maintenir l’intégrité physique de ces deux composantes, et former de larges réservoirs géochimiques ?

Référence : Basaltic reservoirs in the Earth’s mantle transition zone. Benoit Tauzin, Lauren Waszek, Maxim D. Ballmer et Thomas Bodin. PNAS, 21 novembre 2022.
DOI : 10.1073/pnas.2209399119

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