Publication du Centre international de recherche en infectiologie dans The Journal of Allergy and Clinical Immunology le 14 janvier 2019.
Communiqué de presse de l'Inserm.
Pourquoi les plaques d’eczéma provoquées par le contact de la peau avec un allergène réapparaissent-elles aux mêmes endroits alors que la lésion a eu le temps de guérir ? C’est sur cette question que s’est penchée une équipe de recherche associant l’Inserm, l’Université Claude Bernard Lyon 1, l’Ecole normale supérieure de Lyon et le CNRS au sein du Centre international de recherche en infectiologie. Les chercheurs ont découvert que non seulement les allergènes persistaient dans la peau pendant plusieurs semaines mais qu’ils n’étaient pas les seuls. Des cellules immunitaires appelées lymphocytes T mémoire résidents prolifèrent en effet sur les sites de lésion et y persistent pendant de longues périodes, réactivant l’apparition de plaques d’eczéma lors d’un nouveau contact avec l’allergène. Ces travaux parus dans The Journal of Allergy and Clinical Immunology ouvrent de nouvelles perspectives dans la compréhension du fonctionnement et le traitement de l’eczéma de contact allergique.
L’eczéma de contact (ou dermite de contact) allergique est une réaction cutanée provoquée par l’exposition à des substances allergènes. L’inflammation des couches supérieures de la peau qu’elle provoque peut perdurer pendant plusieurs jours, ne disparaît pas tant que la peau reste en contact avec l’allergène responsable et peut même devenir chronique. Elle se manifeste par des éruptions cutanées (plaques d’eczéma) locales, accompagnées de brûlures et de démangeaisons, et réapparaît lorsque les zones guéries sont à nouveau en contact avec l’allergène.
Les lymphocytes T mémoire résidents (TRM) sont des cellules de l’immunité qui persistent à long terme dans les tissus périphériques, comme la peau. Ils participent à la réponse immunitaire secondaire, particulièrement rapide et efficace contre les pathogènes déjà rencontrés mais qui peut être responsable de l’aggravation de certaines maladies inflammatoires comme la dermite de contact. Dans les plaques d’eczéma causées par cette dernière, on observe en effet une accumulation de TRM.
Une équipe de recherche associant l’Inserm, l’Université Claude Bernard Lyon 1, l’École normale supérieure de Lyon et le CNRS, au sein du Centre international de recherche en infectiologie (CIRI) s’est intéressée, chez la souris, à la contribution de ces TRM à la sévérité et à la chronicité de l’eczéma de contact et a observé qu’ils proliféraient localement au niveau des zones cutanées en contact avec un allergène. Les TRM s’accumulent progressivement dans l’épiderme lorsque l’inflammation due à l’allergie de contact se résorbe et y persistent plusieurs semaines. Ils sont ensuite à l’origine de l’apparition de plaques d’eczéma dès que l’allergène entre à nouveau en contact avec la lésion eczémateuse et ce, même si elle semble guérie.
L’équipe de recherche a donc essayé de comprendre les causes de la persistance de ces TRM dans la peau. Elle a ainsi constaté que les allergènes pouvaient rester dans l’épiderme pour une période bien supérieure à celle estimée jusqu’à présent (au minimum un mois). Cette persistance des allergènes dans les zones guéries pourrait expliquer la stimulation durant plusieurs semaines de la prolifération des TRM qui leur sont spécifiques, ainsi que leur persistance dans la lésion eczémateuse.
Enfin les chercheurs ont pu observer que la réactivation des TRM responsables des plaques d’eczéma était soumise à un rétrocontrôle permis par un ensemble spécifique de récepteurs inhibiteurs porté par les TRM eux-mêmes. Lors d’une réexposition à une faible dose d’allergène, ces récepteurs sont activés et répriment l’activité des TRM en empêchant ainsi une réaction immunitaire excessive.
Ces travaux permettent de mieux comprendre comment les TRM sont impliqués dans la réapparition locale des plaques d’eczéma. Ils montrent également que le développement de stratégies thérapeutiques empêchant la réactivation locale des TRM à travers leurs récepteurs inhibiteurs pourrait ouvrir de nouvelles perspectives dans le traitement de la dermite de contact allergique.
Source : Inhibitory checkpoint receptors control CD8+ resident memory T cells to prevent skin allergy
Pia Gamradt, Léo Laoubi, Audrey Nosbaum, Virginie Mutez, Vanina Lenief, Sophie Grande, Daniel Redoulès, Anne-Marie Schmitt, Jean-François Nicolas, Marc Vocanson (2019). The Journal of Allergy and Clinical Immunology. 14 janvier 2019. doi : 10.1016/j.jaci.2018.11.048
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