La littérature allemande naît à l’époque carolingienne et connaît sa première apogée vers 860 avec le Livre des Evangiles d’Otfrid de Wissembourg, environ 14 000 vers à rimes finales, une première européenne dans une langue vernaculaire. Riche et variée dans sa production, l’époque carolingienne n’engendre toutefois pas d’épopée et ne nous a laissé que peu d’œuvres épiques en dehors des récits bibliques. La plus importante est la Chanson de Hildebrand, un poème fragmentaire de 68 vers dont la fin est perdue. Elle relate le combat du héros éponyme contre son fils et campe l’action sous le règne de Théodéric le Grand à la charnière entre l’Antiquité et le Moyen Âge.
Nous retrouverons Hildebrand comme le vieux maître d’armes de Dietrich von Berne, c’est-à-dire Vérone, dans la Chanson des Nibelungen composée vers 1200. Dans ce grand poème constitué de quelque 2300 quatrains à vers longs et d’un interminable épilogue de plus de 4000 vers courts, Hildebrand et Dietrich vivent en exil à la cour d’Etzel, roi des Huns dans la Hongrie actuelle, comprenez le redoutable Attila. En secondes noces, il a épousé la vindicative Kriemhild, veuve de Siegfried, le tueur de dragon. Elle est originaire de Worms où son frère Gunther règne sur le royaume des Burgondes. Treize ans après son remariage, Kriemhild invitera toute sa famille dont Hagen, l’assassin de Siegfried, à une grande fête chez les Huns. Le voyage des Burgondes qui partent armés par précaution va se terminer dans un immense bain de sang auquel seuls Hildebrand, Dietrich et Etzel survivront.
Lors de sa redécouverte au XVIIIe siècle, un professeur prédit que la Chanson des Nibelungen pourrait devenir « l’Iliade allemande ». A la différence des compagnons de Charlemagne qui, hormis Roland, retournent dans la « douce France », à la différence des Grecs qui, hormis Achille et quelques autres, rentrent chez eux après la destruction de Troie, les Burgondes périssent sans exception, hormis ceux restés à Worms. La Chanson des Nibelungen est une tragédie nationale qui relate un désastre militaire et la fin d’un empire. En 1943, à la veille de la capitulation des Allemands à Stalingrad, Hermann Goering se servit de l’épopée nationale pour exhorter ses soldats encerclés au sacrifice suprême.
Le poème sera présenté avec un résumé détaillé et une interprétation politique du message de son mystérieux auteur anonyme. Aucune connaissance préalable n’est pas requise.
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