Résumé du Mémoire inédit : « Roi citoyen, roi patriote. Sociogenèse d’un rôle d’autorité politique dans la France des Lumières »
Qu’il s’agisse de leaders charismatiques ou de « chefs d’État » et de « gouvernement », la persistance de formes monarchiques de pouvoir au sein des démocraties parlementaires n'est pas un mystère entièrement élucidé. Cette enquête socio-historique jette un éclairage sur les origines culturelles de cet aspect méconnu du gouvernement représentatif : la prétention du chef du pouvoir exécutif à représenter la nation. Elle plonge dans les nombreux discours sur la monarchie et la royauté qui se sont déployés au XVIIIe siècle autour des figures du « roi citoyen » et du « roi patriote » entre la France et le Royaume-Uni. Peu étudiées, ces figures se retrouvent pourtant dans une étonnante pluralité de sources et de configurations sociales : dans les cours de Versailles, de Londres et de Lunéville ; chez des poètes, prédicateurs, diplomates, philosophes, économistes, administrateurs… Il en surgit un véritable rôle d’autorité, une technologie politique inventée au cœur des Lumières pour renouveler l’appareil symbolique de l’État royal.
D’abord destiné à retremper les thèmes classiques du roi très-chrétien et du monarque absolu de droit divin, le titre de roi citoyen se doubla rapidement de celui de « pasteur » bienfaisant et pacifique, humain et proche de ses ouailles. Avec l’importation en France des idées du tory Bolingbroke et l’intervention concurrente du marquis d’Argenson, il fut retravaillé dans des directions plus audacieuses. Magistrat suprême et réformateur éclairé plutôt qu’incarnation mystique de la nation, le « roi citoyen » répondait aux transformations de la société française qui questionnaient les anciennes conceptions de la souveraineté : essor de l’« opinion publique » et du « parti philosophique », contestations parlementaire et janséniste, expansion économique et démographique. Cette figure finit par croiser trois prétentions à représenter : la nation (un monarque supra-partisan), la vertu (un berger dévoué jusqu’au sacrifice), et la vérité (un gouverneur éclairé par les sciences de gouvernement). À l’aube de la Révolution, le rôle de roi citoyen fut dépouillé de toute légitimité traditionnelle, mais rapidement réinvesti dans des figures très plastiques de monarque républicain, allant du « premier citoyen » soumis aux vœux de la nation au chef néo-césariste à la fois sauveur, savant et rassembleur.
Devant un jury composé de :
- Monsieur David Avrom BELL
- Madame Myriam-Isabelle DUCROCQ
- Madame Frédérique MATONTI
- Monsieur Olivier CHRISTIN
- Madame Fanny COSANDEY
- Monsieur Jean-Philippe HEURTIN
- Madame Anne VERJUS
Gratuit
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