Cette thèse porte sur le renouveau et les fonctions du dialogue en tant que genre littéraire en Europe du début du XIXe siècle à la première moitié du XXe siècle, envisagé sur son mode conversationnel. Il s’appuie plus précisément sur l’étude des Imaginary Conversations (Conversations imaginaires, 1824-1862) de Walter Savage Landor, des Operette morali (Petites Œuvres morales, 1826-1835) de Giacomo Leopardi, des Conversations dans le Loir-et-Cher ainsi que des dialogues « japonais » (1926-1937) de Paul Claudel, et de plusieurs dialogues de Paul Valéry, principalement Eupalinos, L’Âme et la Danse et L’Idée fixe (1921-1943). En rapprochant ces œuvres d’une grande variété, il s’agit de déceler la manière dont se manifeste en leur sein une parole multiforme qui, loin des artifices rhétoriques, renouvelle profondément la tradition antique du dialogue philosophique et l’art classique de la conversation. Landor, Leopardi, Claudel et Valéry font du dialogue conversationnel le lieu d’une parole libre, digressive et palinodique, qui s’inscrit dans une esthétique d’un désordre ordonné des mots et de la pensée. L’espace dialogique, transcendant les temps, rend possible l’avènement d’une parole médiatrice apte à négocier entre le sensible et l’intelligible, en saisissant la modernité historique d’un point de vue linguistique. La conversation devient l’ultime moyen d’accéder à une connaissance de soi par le biais de l’autre, envisagé comme un double de soi-même. Les pointes du langage perçant de multiples failles dans le tissu du discours, la prose conversationnelle recueille alors l’épiphanie d’une poésie conversationnelle, consubstantielle à la pratique démocratique du langage.
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