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Quand les protéines végétales ont le coup de foudre pour le gras

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Publication du RDP

Cette petite plante Arabidopsis thaliana a servi de modèle afin d’étudier la répartition des lipides dans la cellule.
Une équipe du laboratoire Reproduction et Développement des Plantes (RDP – Université de Lyon, ENS de Lyon, Université Claude Bernard Lyon 1, CNRS, INRA) vient de révéler que certains lipides génèrent un champ électrostatique pour orienter les protéines vers la surface de la cellule. Publiés dans la revue Nature Plants le 20 Juin 2016, ces travaux portent sur une question centrale en biologie : quels sont les mécanismes qui régissent la géographie de la cellule ?
Les protéines ont des localisations spécifiques au sein de la cellule, ce qui contribue à leur activité. Par exemple, elles peuvent être localisées dans le noyau pour réguler l’expression des gènes, dans les mitochondries pour produire de l’énergie ou à la surface cellulaire pour orchestrer la communication avec les cellules avoisinantes. Comment les protéines sont orientées vers différents territoires est une question commune à toute cellule, qu’il s’agisse d’une bactérie, d’une cellule humaine ou d’une cellule de plante.
Les différents compartiments de la cellule eucaryote sont délimités par une bicouche lipidique appelée membrane. Chacune de ces membranes possède une composition lipidique particulière, qui est reconnue par les protéines et permet de les orienter vers les différents territoires de la cellule. Afin d’étudier la répartition des lipides dans la cellule, l'équipe "Signalisation Cellulaire et Endocytose" du RDP a utilisé la plante modèle Arabidopsis thaliana.
En cartographiant la localisation des lipides, les chercheurs se sont aperçus que certains d’entre eux s’accumulent à la surface cellulaire, au niveau de la membrane plasmique. De façon surprenante, ces lipides possèdent une caractéristique commune et rare pour un lipide : ils sont chargés négativement. Les chercheurs ont émis l’hypothèse que l’accumulation de ces lipides anioniques pourrait conférer des propriétés électrostatiques à la membrane plasmique. Ils ont alors mis au point des sondes fluorescentes qui réagissent à la force du champ électrostatique émis par les membranes. Grace à ces sondes, ils ont pu vérifier que la membrane plasmique est particulièrement électronégative. Cette propriété la différentie des autres membranes de la cellule et assure la localisation de nombreuses protéines impliquées dans la signalisation cellulaire et hormonale.
L’équipe s’est ensuite demandée pourquoi certaines protéines sont sensibles au champ électrostatique membranaire tandis que d’autres ne le sont pas. En comparant les séquences de ces deux types de protéines, les chercheurs ont découvert une séquence « hameçon » qui permet d’ancrer les protéines à la surface cellulaire. Cette séquence possède elle aussi des propriétés de charge particulière, puisqu’elle est fortement positive. Ainsi, les protéines possédant la séquence hameçon électropositive sont attirées par la membrane plasmique, qui est électronégative. En revanche, les protéines ne possédant pas cette séquence hameçon sont insensibles aux charges de la membrane plasmique.
Ce travail démontre donc que l’identité des membranes biologiques peut être régulée par les charges portées par les lipides. Il s’agit d’un système « clef-serrure » relativement simple mais qui a un grand potentiel de régulation. En effet, les voies cellulaires peuvent faire rapidement varier la « clef », en modifiant les lipides présents à la membrane plasmique, ou la « serrure », en changeant les propriétés de la séquence hameçon. Ces travaux ouvrent la voie vers de futures recherches visant à comprendre comment le champ électrostatique membranaire est mis en place et varie au cours de la division et différenciation des cellules.

Références :
Simon MLA, Platre MP, Marquès-Bueno MM, Armengot L, Stanislas T, Bayle V, Caillaud MC and Jaillais Y. 2016. A PtdIns(4)P-driven electrostatic field controls cell membrane identity and signaling in plants. Nature Plants.16089 | DOI: 10.1038/NPLANTS.2016.89

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Plus d'information sur le site de l'institut des sciences biologiques du CNRS. Cliquer ici
Contact chercheur : Yvon Jaillais

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